Catégorie : Son histoire à LuiEn ce 14 juillet 1789, le peuple avait pris les armes ; les tirs de canon se croisaient et la Bastille n'allait plus tarder à lâcher prise. Voilà où la France avait été menée, par les entêtements du roi Louis XVI et les folies insouciantes de la reine Marie-Antoinette. Depuis quelques années déjà, l'espoir courrait dans les rues de la capitale puantes de famine, et voilà qu'ils y étaient ; la victoire était proche. Chacun avait dû choisir son camp, et les trahisons se faisaient de plus en plus fréquentes. Les compagnies de la Garde Française, entre autres, ne répondaient plus aux ordres du roi et leurs soldats revendiquaient leurs droits de citoyens.
Au beau milieu de cette révolution qui faisait ravage de tous côtés, de cette rage violente et sauvage ; dans le tumulte indescriptible et grondant de colère que formaient toutes ces gens assoiffées de vengeance, ces parisiens qui ne voulaient rien d'autre que la liberté ; dans la poussière, les cris de haine et le sang poisseux qui coulait le long des pavés, André de Jarjayes cherchait sa promise, il l'appelait désespérément. Ne voyant presque plus rien de son seul oeil valide, il tentait tant bien que mal de rester debout, poussé de toutes parts tant par ceux qui fuyaient que par ceux qui courraient rejoindre leurs frères à l'avant du combat.
Quasiment aveugle, il ne vit pas le soldat agonisant qui gisait à ses pieds. Il ne vit pas le mousquet que celui-ci serrait encore dans sa main. Il ne vit tout simplement pas le coup venir. Il ne ressentit que la douleur, et ne vit qu'une étendue de ténèbres se présenter à lui, sans savoir s'il était mort ou s'il avait définitivement perdu la vue. Tout autour de lui, les citoyens continuaient à relâcher la haine qu'ils avaient si longtemps cultivée, sans même avoir le temps de se soucier des blessés. Mais la chute d'Alain ne passa pas inaperçue auprès de ses camarades de la Garde Française. Il fut amené de toute urgence dans une ruelle déserte, sur un brancard de fortune. On alla quérir des médecins, ou ce qui pouvait en faire office.
Seulement, le destin était joueur, et le verdict était clair, le coup avait été porté trop près du coeur pour que l'on puisse tenter quoique ce soit. André gémissait, quémandait sa bien aimée, se raccrochait à la vie. Qu'avait-il donc fait pour mériter pareilles souffrances ? Et Cécile, sa Cécile qu'il n'avait pas retrouvé, que lui était-il arrivé ? Soudain, il sentit qu'on lui prenait doucement la main.
"Cécile, c'est toi ? Cécile, mais... ce sont bien des larmes que je sens ! Pourquoi pleures-tu donc ? Je vais mourir, c'est cela ? Oh, non, cela serait trop bête. Pas alors que nous venons de nous avouer notre amour, pas alors que la France va enfin pouvoir vivre des jours meilleurs. Tu entends, cela serait trop bête de mourir maintenant !
- André, tais-toi donc, par pitié... Tu vivras, tu vivras. Promets-moi que lorsque tout sera fini, nous nous marirons, je serai ta femme. Nous vivrons dans la joie, parfois dans la douleur, mais nous serons libres, tu verras. Nous pourrons enfin nous aimer, André. Loin de toute cette barbarerie, nous serons ensemble jusqu'à notre dernier souffle.
An... mais... André ? André, réponds ! Ne me laisse pas, non, tu n'as pas le droit !"
Mais malgré ses cris de détresse et de désespoir, la jeune fille n'obtint jamais de réponse. André était mort les yeux ouverts, sans plus rien voir. On pouvait lire sur son visage les mots d'adieu qu'il n'avait pas pu dire. Il était mort heureux d'avoir obtenu ce qu'il avait désiré tout sa vie durant.
Cécile.
Lady Oscar et Mrs Jones ont tous mes hommages.