12.7.08

Comme l'aube qui se lève

Catégorie : Son histoire à Lui

L'idée vient de lui traverser l'esprit. C'est absurde, oh oui, vraiment. Mais il ne peut s'empêcher de penser qu'Aurore est décidément un bien joli nom. Et qu'il ressemble étrangement au sien. Trop, peut-être.
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Il sera patient. Il marchera doucement. Et il l'attendra au pied de l'arbre. Il fermera les yeux, percevant les rayons du soleil qui se lève au delà de ses paupières closes. Il l'entendra venir, ses pas écrasant dans un bruit délicieux les feuilles jaunies par le temps. Elle posera son sac, murmurera son nom puis dira en riant qu'il est un être d'or et de lumière. Il la sentira s'assoir à ses côtés, faisant tourbillonner autour d'elle un nuage de poussière. Il aura des papillons dans le ventre. Non, des papillons de nuit, ils avaient décidé que c'était plus viril. Puis il lui posera une question. N'importe laquelle. Et elle répondra : « Je suis Aurore, bien sûr que oui. »

Plus tard, leur arbre aura perdu toutes ses feuilles, les champs seront givrés. Alors il l'emmènera sur le lac gelé. Il la fera vivre sur cette étendue glacée, et elle dansera sans plus s'arrêter. Il lui demandera si elle a froid, et accueillera avec un plaisir toujours nouveau l'habituel « Je suis Aurore, bien sûr que oui. » Il enlèvera son écharpe pour l'enrouler autour de leur deux cous frêles et exposés. Puis ils s'affaleront dans la neige pour contempler le jour venir, à une heure si tardive, éclairer la cîme des arbres. Il chuchotera son prénom au creux de son oreille rougie, et il saura qu'elle aura fermé les yeux et laissé ses lèvres esquisser un faible sourire.

Au printemps, l'herbe aura bien repoussé. Il courra à sa poursuite au milieu des épis de blés, dans la brume et le vent frais. Puis il la rattrapera et la gardera près de lui, sentant son parfum sucré. Lorsqu'elle se retournera pour se nicher dans son cou, soufflant sur sa peau découverte, il frissonnera. Il tendra ensuite sa main, cueillera une fleur de pommier et la fera tenir dans ses longs cheveux bruns. Il voudra savoir si elle l'aime, elle affirmera naturellement « Je suis Aurore, bien sûr que oui. » en remettant une mèche rebelle à sa place d'une main timide. Il donnera alors un coup de tête vers le côté, et elle comprendra. Sans un mot.

Cette fois il ne l'attendra pas, il se réveillera à ses côtés. Ils seront les enfants de l'aube, qu'ils n'auront pas vu se poindre, pas cette fois. Il ne se lèvera pas tout de suite mais laissera sa main reposer sur le ventre de la jeune fille et la contemplera en silence. Quand elle ouvrira les yeux, il lui avouera à quel point il la trouve magnifique. « Je suis Aurore... » Alors qu'il lui lancera un sourire innocent, elle rougira comme une petite fille prise en faute. Au lieu de la fin habituelle de sa phrase, elle dira : « Ca te surprend toujours, on dirait. » Puis elle voudra partir, et il ne la retiendra pas. Il sait qu'elle reviendra, à l'automne prochain.

Ils vivront, pour voir l'aurore. Ils vivront, comme l'aube qui se lève. Et main dans la main, ils avanceront. Immortels, ils sont la Lumière.




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